I. Histoire du Yémen depuis 1990 et point de vue de l’AISP
Contexte de l’unification : deux systèmes opposés
Le 22 mai 1990, le Yémen du Nord, représenté par la République arabe du Yémen, et le Yémen du Sud, dont la République démocratique et populaire occupe l’espace politique, se sont unifiés. Cette unification a marqué la fin de décennies de division et de conflits entre les deux entités. Cependant, l’unification a également signé le début d’une cohabitation difficile entre deux systèmes radicalement opposés.
D’un côté, on retrouvait un État religieux et conservateur, le Yémen du Nord, avec une société traditionnelle et des institutions religieuses fortes. De l’autre, un régime socialiste et marxiste, le Yémen du Sud, allié à l’URSS, avec une idéologie laïque et progressiste. Cette dualité a créé des tensions politiques internes dès le début de l’unification.
Tensions post-unification
Les années qui ont suivi l’unification ont été marquées par des tensions politiques internes croissantes. Les différences idéologiques et culturelles entre le Nord et le Sud ont rendu la cohabitation difficile. Les institutions politiques et économiques des deux anciens États étaient incompatibles, ce qui a entraîné des conflits de pouvoir et des rivalités internes.
En 1994, ces tensions ont abouti à une guerre civile entre le Nord et le Sud. Le Nord, dirigé par Ali Abdallah Saleh, est sorti vainqueur du conflit et a pris le contrôle du pouvoir. Cette victoire a marqué le début d’une période d’autoritarisme sous la direction de Saleh, qui a gouverné le Yémen d’une main de fer pendant des années.
La montée des rébellions
Face à l’autoritarisme de Saleh, des rébellions ont commencé à émerger. Les rebelles chiites, connus sous le nom de Houtis, ont été parmi les plus actifs. Les Houtis, qui représentent une minorité religieuse au Yémen, ont commencé à se rebeller contre le gouvernement central, accusant ce dernier de discrimination et de marginalisation.
En 2014, ces tensions ont abouti à une nouvelle guerre civile. Les Houtis, soutenus par l’Iran, ont pris le contrôle de vastes territoires, y compris la capitale, Sanaa. Le président Saleh a été poussé vers la sortie en 2015, marquant la fin de son règne et le début d’une période de chaos et d’instabilité politique.
Déclaration de l’Association Internationale des Soldats de la Paix
Quel média évoque le Yémen à l’heure actuelle ? L’espace informatif est monopolisé par le conflit russo-ukrainien et israélo-palestinien. Sans doute, ces derniers sont importants car ils causent la mort de milliers de civils. Cependant, il est impératif de mettre sur la table la situation au Yémen.
Onze années, maintenant, que les Yéménites souffrent des dégâts collatéraux d’une guerre opposant le gouvernement aux insurgés. Le conflit ne s’est jamais arrêté, il s’est même accentué ces trois dernières années, ce qui a contribué à une aggravation des pertes et des blessés.
Le bilan humanitaire
En tant qu’Association Internationale des Soldats de la Paix, nous sommes profondément préoccupés par le bilan au Yémen :
– Selon les Nations Unies, 75 % de la population ont besoin d’une assistance humanitaire.
– 18 millions de personnes sont en insécurité alimentaire.
– Plus de la moitié de la population n’a pas accès à de l’eau potable.
– Pour Amnesty International, 377 000 personnes auraient perdu la vie.
Les principales causes de cette crise humanitaire correspondent aux bombardements et aux explosions liées aux tirs des groupes armés non étatiques qui détruisent les commerces et les canaux d’eau. Les infrastructures de base, telles que les hôpitaux et les écoles, ont également été gravement endommagées, aggravant encore la situation humanitaire.
Appel à l’action
En tant qu’organisation en charge de la promotion de la paix, prévenant les futurs conflits armés et soucieuse de la protection des populations civiles, nous appelons à une action plus concrète et plus ferme des Nations Unies et des autres acteurs pour atteindre une situation pacifiste. Nous souhaitons alerter quatre acteurs différents. Pour commencer, nous encourageons l’action de l’ONU, à court terme, d’essayer d’établir un cessez-le-feu pour stopper le massacre actuel. Ensuite, nous incitons la communauté internationale à intensifier ses efforts diplomatiques pour favoriser une solution politique inclusive, fondée sur le dialogue, le respect de la souveraineté yéménite et la justice pour les victimes.Il faut absolument que la communauté internationale et les représentants des Houtis trouvent un terrain d’entente pour que les bombardements américains cessent au Yémen. Pour cela, il est nécessaire de trouver des médiateurs crédibles. Par exemple, le Qatar, qui possède une relation souple avec l’Iran, financeur des Houtis, pourrait convaincre Américains et Houtis de cesser les frappes. Les bailleurs de fonds et les organisations humanitaires doivent aussi maintenir leur soutien au peuple yéménite, sans condition ni instrumentalisation politique. Enfin, les institutions judiciaires internationales doivent enquêter sur les crimes de guerre présumés commis par toutes les parties, afin de lutter contre l’impunité.
Conclusion
Le Yémen ne doit pas continuer d’être un champ d’expérimentation militaire, un théâtre d’affrontements par procuration ou un centre de l’islamisation. Il doit redevenir une terre de paix, de culture et de dignité humaine. La paix n’est pas une option : c’est une urgence vitale.
Nous, Soldats de la Paix, réaffirmons notre engagement à agir, à témoigner, à soutenir toutes les initiatives qui tendent vers la réconciliation, la reconstruction et la paix durable au Yémen et dans le monde.
II. Les acteurs internationaux et leurs rôles
Le rôle des Nations Unies
Les Nations Unies jouent un rôle crucial dans la résolution des conflits et la promotion de la paix au Yémen. Depuis le début du conflit, l’ONU a tenté de faciliter des négociations de paix entre les parties belligérantes. Cependant, ces efforts ont été entravés par la complexité du conflit et les intérêts divergents des parties prenantes. L’ONU a également fourni une assistance humanitaire essentielle à la population yéménite. Les agences des Nations Unies, telles que le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), ont travaillé sans relâche pour fournir de la nourriture, des médicaments et d’autres formes d’aide aux personnes dans le besoin.
Le rôle des États-Unis
Les États-Unis ont été impliqués dans le conflit yéménite de plusieurs manières. D’une part, ils ont fourni un soutien militaire et logistique à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite, qui intervient au Yémen pour soutenir le gouvernement reconnu internationalement. D’autre part, les États-Unis ont également mené des frappes aériennes contre des cibles liées à des groupes terroristes, tels qu’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA).
Cependant, l’implication des États-Unis dans le conflit a été controversée. Les frappes aériennes américaines ont causé des pertes civiles et ont été critiquées pour leur manque de précision. De plus, le soutien américain à la coalition dirigée par l’Arabie saoudite a été accusé d’aggraver la crise humanitaire au Yémen.
Le rôle de l’Iran
L’Iran a été accusé de soutenir les rebelles Houtis au Yémen, leur fournissant des armes, des financements et une formation militaire. L’implication de l’Iran dans le conflit yéménite est vue comme une tentative d’étendre son influence dans la région et de contrecarrer les intérêts de l’Arabie saoudite et de ses alliés.
Cependant, l’Iran nie toute implication directe dans le conflit et affirme que son soutien aux Houtis est purement politique et humanitaire. Malgré ces dénégations, les preuves de l’implication iranienne dans le conflit sont nombreuses et ont été documentées par des organisations internationales et des médias indépendants.
Le rôle des organisations humanitaires
Les organisations humanitaires jouent un rôle crucial dans la fourniture d’une assistance vitale à la population yéménite. Des organisations telles que Médecins Sans Frontières (MSF), le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et Oxfam travaillent sans relâche pour fournir des soins médicaux, de la nourriture, de l’eau potable et d’autres formes d’aide aux personnes dans le besoin.
Cependant, les organisations humanitaires font face à de nombreux défis dans leur travail au Yémen. Les restrictions imposées par les parties belligérantes, les attaques contre les travailleurs humanitaires et les difficultés logistiques rendent leur travail extrêmement difficile. Malgré ces défis, les organisations humanitaires continuent de fournir une assistance vitale à la population yéménite et de plaider pour une résolution pacifique du conflit.
III. Les perspectives d’avenir
Les défis à surmonter
Le Yémen fait face à de nombreux défis pour sortir de la crise actuelle. Le conflit a causé des destructions massives et a aggravé les divisions politiques et sociales. La reconstruction du pays et la réconciliation nationale seront des processus longs et difficiles. De plus, la crise humanitaire au Yémen est l’une des pires au monde. Des millions de personnes ont besoin d’une assistance vitale pour survivre. La fourniture d’une aide humanitaire adéquate et la reconstruction des infrastructures de base seront essentielles pour améliorer les conditions de vie de la population.
Les opportunités de paix
Malgré les défis, il existe des opportunités pour atteindre une paix durable au Yémen. Les efforts diplomatiques internationaux, tels que les négociations de paix parrainées par l’ONU, offrent une lueur d’espoir pour une résolution pacifique du conflit.
De plus, la communauté internationale a un rôle crucial à jouer dans la promotion de la paix
et de la stabilité au Yémen. Les pays étrangers peuvent fournir un soutien politique, financier
et technique pour faciliter la reconstruction et la réconciliation nationale.
Conclusion
Le Yémen est à un carrefour critique. Le pays peut soit sombrer davantage dans le chaos et la violence, soit saisir les opportunités pour atteindre une paix durable et reconstruire un avenir meilleur pour son peuple. La communauté internationale a un rôle crucial à jouer dans ce processus et doit redoubler d’efforts pour soutenir le Yémen dans sa quête de paix et de stabilité.
En tant que Soldats de la Paix, nous réaffirmons notre engagement à agir, à témoigner et à
soutenir toutes les initiatives qui tendent vers la réconciliation, la reconstruction et la paix
durable au Yémen et dans le monde. La paix n’est pas une option : c’est une urgence vitale.
Sous la direction de Laurent Attar-Bayrou, Président de l’Académie Internationale de la Paix
Ecrit par Matis B.
Bibliographie :
Le Yémen unifié :
https://www.universalis.fr/encyclopedie/yemen/5-le-yemen-unifie/
L’impossible unité du Yémen, en cartes :
https://www.lorientlejour.com/article/1218871/trente-ans-apres-son-unification-le-
yemen-se-disloque.html
Trente ans après l’unification, le Yémen se disloque :
https://www.lorientlejour.com/article/1218871/trente-ans-apres-son-unification-le-
yemen-se-disloque.html
Yémen :
https://www.unhcr.org/us/where-we-work/countries/yemen
The UN in Yemen :
https://yemen.un.org/en/about/about-the-un
Géopolitique du Yémen à l’aube du XXIème siècle :
https://shs.cairn.info/revue-herodote-2016-1-page-159
Yemen Humanitarian Crisis :
https://admin.unrefugees.org/emergencies/yemen/
